Un cortinaire à lames vertes
Couleur chimiquement instable, aussi bien en peinture qu'en teinture, le vert est, à la fin du Moyen Âge, symboliquement associé à tout ce qui est changeant ou capricieux : la jeunesse, l'amour, la fortune, le destin. Par là même, il tend à se dédoubler : d'un côté le bon vert, celui de la gaîté, de la beauté, de l'espérance, de l'autre le mauvais vert, celui du Diable et de ses créatures, des sorcières, du poison, qui étend son empire et porte désormais malheur en de nombreux domaines.
Michel Pastoureau, Vert, histoire d'une couleur
Le vert est une couleur rare en mycologie. Réservé aux végétaux dont les champignons ne font plus partie depuis 1969, le vert est distribué avec parcimonie dans le royaume fungique. Il est une couleur qui inquiète, à l'instar du bleu et du violet.
Notre cortinaire : Cortinarius montanus var. fageticola Moser = Phlegmacium herpeticum var. fageticola Moser, luit obscurément de ses lames vert olive, qui contrastent et se mêlent au jaune-brun du chapeau flammé-fouetté de rouille, au bleu acier du pied. L'ensemble de ces teintes osmotiques fomente une beauté sordide, un joyau scintillant et confus de matière fangeuse, végétale et sidérale.
Au sein de la série scaurus à laquelle il appartient – qui rassemble des cortinaires à chapeau visqueux et hygrophane, à lames vert olive – il se démarque par son habitat sous hêtres acidiphiles et par la marge de son chapeau brun chocolat à l'état imbu. Très rare, solitaire ou par deux, trois, ce cortinaire ne se dévoile qu'à l'œil averti, de-ci de-là, en forêt de Châteauroux, en Brenne ou dans les bois de Déols, sous les hêtres en terrain acide.
(6 novembre 2014)
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